Souvenirs sur André-Charles Nauleau par Guy Fagette
Il ne suffisait pas d’aller très loin, André-Charles Nauleau aimait la Vendée. Toute son œuvre est axée sur le bocage et le marais. Il adorait les petits chemins de terre qui mènent invariablement à la ferme, à ses champs, ses granges où logent le troupeau, le cheptel, les travaux du paysan dans les années 1950.
Nous partions l’après-midi à la belle saison, parfois très tôt à l’automne, époque qu’il admirait, tant pour ses couleurs, niché sur sa palette parmi les teintes chaudes qui s’enchevêtraient à loisir, que pour sa dextérité à rendre l’harmonie à cette saison où les verts succombent un à un à la rousseur envahissante de cette richesse éphémère. Lire la suite
Quitter le pentagone était un jeu et en ce temps il existait maints chemins de terre pour s’échapper. Planter son chevalet était aisé et la campagne à portée de main nous appartenait. La beauté à créer en nous, à retranscrire sur notre support, était là, toute faite par le bon dieu et nous demandait d’user de notre imaginaire pour en faire la chose unique qu’on ne pourra voir nulle part ailleurs.
La Péronnière, la petite Rochette, la Grimaudière, la Lardière… Voilà le sujet Nauleau, le site qui lui convient, qu’il a déjà sillonné, qu’importe, aujourd’hui est un autre jour, il lui convient de marquer l’instant, le ciel nuageux à souhaits, dans la grisaille, la ferme juchée sur la buttée de verdure fermant le chemin de rocaille faite de gris.
Voiture sur bas côté, arrière relevé, matériel en place, appui sur le capot, chevalet au fossé et les regards scrutant l’horizon prometteur. Une bonne heure de bonheur. Une pochade pour chaque tempéraments, qui deviendront deux œuvres et qui devront après, vivre leur vie générée au même moment, au même endroit emportant dans cet élan créateur toute leur vie souterraine, enfouie dans la pâte que deux univers ont domptés.
L’espérance d’une humble pochade a grandi et a fait un tableau. On pense alors aux souvenirs et au temps qui passe. A l’humble paysan qui nous a croisé pendant l’ouvrage. A deux mots. Aux rires puissants d’André-Charles Nauleau marquant satisfaction.
A l’oubli du ciel gris qu’on emporte avec soi pour la vie parce que l’on a capté son essence, ses gris de bocage enfermés à jamais sur une traînée colorée et striée de blanc. On ne s’en remet qu’en continuant à vivre sa passion jusqu’au bout. Quoi qu’on puisse en dire, il faut aller sac au dos vers de nouveaux horizons.
André Nauleau le sait, il parcours sans cesse cette Vendée qui l’inspire et partage sa joie avec l’autre. Il veut laisser sa trace, son empreinte et la peinture c’est son orgueil.
Portrait d’AC Nauleau par Guy Fagette en 1966